Fitch et la dette de l’Etat français
Fitch a été la première agence de notation à dégrader la note de la dette de l’Etat français (et non de la France, comme souvent écrit, cette dernière étant une nation, c’est-à-dire le cocktail d’un peuple, d’un territoire et d’une Histoire dont l’Etat est le serviteur politique et administratif). En effet, la situation politique, illustrée à la fois par la démission de François Bayrou, et la répulsion de 80 % des députés à voter la moindre réduction de dépenses publiques, n’aide pas à mettre en œuvre « un plan crédible d’assainissement budgétaire », comme Fitch l’exigeait en mars.
Fitch ouvre le bal des revues d’automne des agences de notation. Toutes classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette « haute ou bonne »), avec, pour certaines comme Fitch, une « perspective négative ». Ce qui préfigure une dégradation : en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité « moyenne supérieure »), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, en clair des intérêts plus élevés. La note AA- peut paraître correcte mais la France a bénéficié jusqu’en 2012 du prestigieux triple A encore attribué aujourd’hui à l’Allemagne. La France paye aujourd’hui cinquante et un exercices consécutifs dans le rouge pour son Etat, « performance » motivé par une conception dévoyée de la relance keynésienne (le célèbre économiste britannique se retournerait sans doute sans sa tombe, lui qui préconisait, certes, un déficit public pour doper la demande, mais uniquement après une franche récession et à condition de dégager un excédent dès retour à meilleure fortune) inédite depuis Louis XIV qui pratiquait la banqueroute comme d’autres vont au restaurant, et sans équivalent parmi les principaux Etats de la planète aujourd’hui.
Le gouvernement ne sera vraisemblablement pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l’an prochain
Même si un attentisme de Fitch, la plus petite des trois principales agences de notation derrière S& P et Moody’s, n’est pas à exclure, le maintien de la note de la dette de l’Etat français serait incohérent du fait que17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu’ils ont – à très peu d’exceptions près – des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024. Le gouvernement ne sera vraisemblablement pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l’an prochain, contre les 4,6% qu’espérait François Bayrou.
La dette française se négocie déjà à un taux bien plus coûteux, d’environ 80 points de base, soit 0,8 %, que la dette allemande, dépassant même l’espace d’une journée, mardi, le taux de la dette italienne. Les marchés donnent déjà à la France une « notation implicite » bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estiment les analystes. Ils craignent des taux qui resteraient « durablement très élevés », provoquant « un étranglement progressif », avec des intérêts à rembourser captant « une part significative de la dépense publique, alors qu’on a des besoins considérables sur d’autres postes ». Le service de la dette est déjà le principal poste de dépenses de l’Etat français avec celui de l’Education nationale.
L’article Fitch et la dette de l’Etat français est apparu en premier sur Contrepoints.