Les agriculteurs du Cantal ont paralysé l'A75 et sont déterminés à ne rien lâcher

La colère des agriculteurs du Cantal, à l’appel de la FDSEA et des JA, s’est exprimée ce mardi 23 janvier sur l’A75, paralysée à hauteur de Saint-Flour. Ils attendent « des actes forts du gouvernement » pour répondre à leurs revendications « simples et légitimes ». La mobilisation se poursuit dans le Cantal. D’autres actions sont enclenchées en Auvergne.

Dans le Cantal, la mobilisation des agriculteurs, à l’appel de la FDSEA et des Jeunes agriculteurs, a débuté ce mardi 23 janvier, dans l'après-midi, à Saint-Flour, par une minute de silence en hommage aux victimes de l’accident mortel survenu quelques heures plus tôt dans l’Ariège.Deux cents agriculteurs ont répondu à cet appel, se retrouvant à la sortie sud de Saint-Flour sur l’A75. Ils ont installé leurs tracteurs et bennes sur les deux voies de cet axe bloqué à la circulation quelques minutes avant le début de la manifestation, entre les deux sorties de la sous-préfecture cantalienne. 

« On a de quoi manger jusqu’à dimanche. Nous sommes bien décidés à ne rien lâcher tant qu’on n’aura pas des réponses et des actes forts du gouvernement pour nous sortir de cette ornière. On est au début d’une mobilisation qui peut aller jusqu’au Salon de l’agriculture ».

Après l’opération des panneaux d’entrée de communes retournés partout en France, « pour dire qu’on marche sur la tête », la colère du monde agricole est monté d’un cran. « On n’est pas là par plaisir. On a tous du travail sur nos exploitations, mais on est obligés encore de se mobiliser, car on en a ras-le-bol. »La liste des doléances est longue. « Elles sont simples et légitimes. Le revenu est bien trop loin de celui qu’on mérite par rapport au travail qu’on fournit. On veut que la loi Egalim soit respectée. L’explosion des charges avec l’électricité qui va encore prendre 10 % en février, l’augmentation du gazole… On ne peut pas tolérer ça. Et puis les clauses miroir, on veut que ce qui est importé en France soit aux mêmes normes que ce que nous produisons ». Malgré la passion pour leur métier, les jeunes sont inquiets pour l'avenir. Photo Jérémie FulleringerParmi les manifestants, « beaucoup de jeunes », fait remarquer Michel, à la retraite depuis deux ans, mais qui a tenu à « être là aujourd’hui par solidarité avec les actifs ». Tout comme Jean, éleveur âgé de 70 ans à Marcenat, « mobilisé pour les générations futures ».

« Je veux travailler au juste prix et un peu d’équité. Si je gagnais que 10 centimes de plus sur le litre de lait, j’aurais plus de 30.000 € supplémentaires à la fin de l’année », témoigne, « excédé », Thierry, éleveur lait et viande à Ruynes-en-Margeride depuis 1999 avec son frère. Mais il reste « pessimiste, car je ne vois pas comment le gouvernement va pouvoir répondre à nos attentes ».

L’inquiétude se lit sur les visages des nouveaux agriculteurs installés. À l’image de Pierre, 24 ans, qui travaille depuis 2020 sur la commune de Menet, en Gaec avec son père.

« À l’époque, la conjoncture n’était pas celle d’aujourd’hui. Les études économiques étaient au vert et laissaient augurer un avenir prometteur, en tout cas viable. Mais depuis, les prix ont stagné, les charges ont été multipliées par deux ou trois, il y a eu le Covid, les guerres… Et la PAC, qui était une valeur sûre, n’est même plus fiable aujourd’hui ! Moi, entre l’année dernière et cette année, j’ai perdu 8 à 10 % de la subvention. ».

Le jeune homme, qui demande « simplement de vivre de mon métier et travailler tranquillement », se pose « beaucoup de questions sur la pérennisation de l’exploitation » et « ne sait pas à quoi s’attendre de la part du gouvernement. Mais en tout cas, il faut des réponses concrètes et rapides car on ne va pas pouvoir tenir comme ça longtemps ». Il estime que « la passion, c’est bien beau dans les moments difficiles, mais là, elle ne suffit plus ».

Une passion qui va pourtant pousser Lucas, 21 ans, à rejoindre le Gaec familial, à Marcenat, en avril prochain. « Je suis né dedans. Mes parents ne m’ont pas poussé à faire agriculteur mais j’ai l’amour des bêtes et de la terre », dit-il.

Lysa, elle, est fille d’agriculteurs.

« C’est un choix de ne pas travailler à la ferme, car c’est un métier difficile, très peu reconnu et sans jour de repos ».

Mais il est important de se mobiliser « pour soutenir ma famille et mes amis agriculteurs, car on a besoin d’eux chaque jour ».

La FDSEA et les JA vont maintenir l’épreuve de force. Ils attendent les renforts, ce mercredi 24 janvier, de leurs collègues d’Aveyron, de Lozère et de Haute-Loire. Ils ont organisé un planning « pour être en permanence une vingtaine sur le site », indique Mathieu Théron, « très satisfait de cette mobilisation pleinement réussie ».

Isabelle Barnérias