1ère partie. Chantier à son arrivée, messages aux joueurs, style de jeu voulu : entretien avec P.-H. Broncan, manager du CAB
Pratiquement trois mois jour pour jour après avoir été nommé manager sportif du CA Brive, Pierre-Henry Broncan a accepté de se poser pendant plus d’une heure pour revenir sur son arrivée au club, évoquer aussi ses méthodes de travail ou bien ses objectifs pour la fin de saison à venir. Première partie de notre entretien.
Dans son planning ultra-chargé, Pierre-Henry Broncan a pris le temps, mardi après-midi, de revenir pendant plus d'une heure sur ses trois premiers mois à la tête du CA Brive.
Pour cette première partie de l'entretien, on évoque trois thèmes : son arrivée, sa méthode et son regard sur la jeunesse. Sans la moindre langue de bois.
« Un chantier à mon arrivée »
Nommé manager sportif à la tête du CAB jusqu’en juin 2026 en novembre dernier à la place de Patrice Collazo, Pierre-Henry Broncan a confessé qu’il ne s’attendait pas à trouver le club dans une telle situation, même s’il savait qu’il allait devoir gérer le problème des joueurs JIFF.
« En revanche, je n’avais pas mesuré l’ampleur du chantier concernant l’effectif. Quand je suis arrivé, on avait cinq piliers. À ces postes de première ligne, c’est vital d’avoir quatre droitiers, quatre talonneurs et quatre gauchers. On avait aussi cinq demis de mêlée… C’est un fonctionnement que j’avais connu par le passé, dans des clubs moins professionnels que le CAB », pose le manager sportif.
Ce dernier a aussi rapidement remis au goût du jour les séances d’entraînement les dimanches, habituellement estampillés comme des jours de repos en début de saison.
« Pour préparer une rencontre, il faut quatre jours. L’entraînement le dimanche, c’était obligatoire. Il a fallu un temps batailler avec tout le monde mais j’ai bien fait comprendre que si on voulait être au repos les dimanches, il fallait remonter en Top 14. Le travail est primordial pour arriver au but qu’on se fixe », explique Pierre-Henry Broncan qui insiste beaucoup sur la valeur travail, lui qui passe des heures entières à décortiquer le moindre petit détail.
« Le centre de performance est magnifique. Les joueurs extérieurs qui viennent le visiter sont surpris par la qualité mais cet outil doit encore plus transpirer le travail. Le confort, c’est bien, mais dans ce mot, il y a aussi “con”… Un joueur qui a du talent mais qui ne travaille pas, ça ne fonctionne plus dans le rugby moderne. »
« Des messages aux joueurs, même le soir »
ll se lève rugby, il respire rugby et il s’endort rugby. De l’avis de ceux qui l’ont côtoyé de près depuis son arrivée à Brive, il y a trois mois, Pierre-Henry Broncan est un bourreau de travail.
Ses journées ne s’arrêtent pas quand il quitte le centre de performance. Elles se poursuivent chez lui. « J’aime bien revoir les vidéos de nos entraînements, les matches passés, les nôtres et ceux de nos adversaires. Je communique avec les joueurs par message le soir. Je suis emmerdé quand c’est trop tard. Je n’ose pas envoyer. Des fois, j’envoie quand même, je me dis qu’ils le trouveront le lendemain matin (rires). Ça peut être des vidéos, des questions, des encouragements ou des critiques sur le dernier entraînement. »
La réflexion d'une mise au vert même à domicilePour le manager sportif du CAB, qui a pleinement intégré les jeunes dans le fonctionnement de l’équipe pro, « travailler, ce n’est pas forcément passer du temps au stade. Travailler, c’est être précis dans tout ce que l’on fait, sachant qu’il y a toujours cette partie cachée : ce que fait le joueur chez lui en récupération, en hygiène de vie. »
Pour contrôler le maximum de paramètres, Broncan compte beaucoup sur les mises au vert. « À l’extérieur, on met plus d’engagement qu’à la maison. On arrive la veille, on est dans une bulle, on est concentré. À Castres, où on a été invaincu pendant deux ans et demi à domicile, on faisait systématiquement des mises au vert, y compris pour les matches à domicile. »
Un procédé qu’il n’exclut pas d’appliquer à Brive si la mésaventure face à Nevers était appelée à se reproduire. Finalement, la méthode Broncan doit déboucher sur quel style de jeu ?
« Je veux une équipe pragmatique, efficace et en confiance. Il faut maîtriser les basiques du jeu et jouer dans l’avancée. J’ai les joueurs pour ça. Il faut absolument développer le jeu debout. C’est quelque chose qu’il faut travailler beaucoup plus que cela. Dans le rugby actuel, l’avancée ne peut pas passer que par le sol. C’est long à mettre en place. On va trop vite au sol alors qu’on a des joueurs pour jouer debout. On n’a de pas bons soutiens. Ils sont trop au large, ils ne convergent pas assez. Mais on y travaille. »
En toute transparence. « Je n’ai rien à cacher », insiste Broncan. C’est à sa demande, qu’une rencontre a été organisée lundi soir avec une cinquantaine d’abonnés.
« J'appelle nos jeunes talents »
Depuis son arrivée à Brive, le manager souligne constamment l’importance de la jeunesse corrézienne. Et il compte bien encore plus développer ses actions. S’appuyer sur la jeunesse. C’est l’un des crédos de Pierre-Henry Broncan qui a, depuis sa prise de poste, fait monter plusieurs joueurs de l’équipe Espoirs les débuts de semaine.
Le but ? « Permettre aux pros qui ont beaucoup joué de se régénérer et aussi faire intégrer rapidement nos systèmes aux jeunes. Certains peuvent aussi saisir l’occasion pour se montrer. Quand je suis arrivé, ce mode de fonctionnement n’était pas en place », commente le manager sportif qui a une réflexion plus profonde et plus poussée sur la relève, lui qui regarde tous les matches des Espoirs, des Crabos et même des Cadets.
« Il y a quelques jours, j’ai appelé deux de nos prometteurs joueurs Crabos pour qu’ils restent au club la saison prochaine. Je fonctionne comme ça. Ma porte est ouverte pour les pros mais aussi pour les jeunes. Ils doivent se sentir libre de venir me voir s’ils ont une question ou s’ils veulent savoir leur niveau et les axes de progression. »Le talonneur des Crabos, Quentin Algay, fait partie des joueurs les plus prometteurs à son poste en France
Pour ce faire, le Gersois aimerait rapidement être en mesure de filmer tous les entraînements des équipes de jeunes, en plus des rencontres, histoire de gagner du temps dans la progression. « Cela demande une forte organisation mais on va y arriver progressivement. »
Benjamin Pommier et Pascal Goumy Photos : Stéphanie Para