La Coordination rurale force la porte de la Région à Bordeaux pour prendre la parole avant la séance plénière
La Coordination rurale a obtenu de s’exprimer devant les élus de la Région, forçant un peu la porte pour venir critiquer la politique agricole de la majorité.
Entre les agriculteurs de la Coordination rurale et Alain Rousset, le dialogue de sourds se poursuit. Et s’amplifie. Après une première rencontre houleuse au Salon de l’agriculture, le match retour s’est joué, lundi 11 mars, au conseil régional à Bordeaux, où se tenait une séance plénière de la Région.
Les élus ont d’abord dû contourner tracteurs, tas de fumier, de noix ou de ceps de vignes pour accéder à un conseil régional barricadé comme un château-fort. S’en est suivie la reprise du dialogue de sourd entre une délégation de la Coordination et Alain Rousset, dans l’hémicycle, devant des élus de gauche qui ont peu goûté les manières éruptives de la Coordination, des élus de droite à peine moins agacés et des élus RN plus conciliants : ils ont applaudi, debout, l’irruption de la Coordination rurale…
Alain Rousset l’a expliqué a posteriori, ce sont les services de sécurité qui l’ont incité à accueillir une délégation avant la séance. « Le début de l’attaque du bâtiment par un tracteur avec une fourche faisait craindre une intrusion massive. J’ai bien conscience que ça ne peut être que cette fois. Qu’une assemblée d’élus comme la nôtre ne puisse pas se tenir en toute liberté est un acte contre la République. »
Quatre demandesLa Coordination rurale est venue avec quatre demandes à la Région : arrêter le programme Néo terra, arrêter la promotion du label Haute valeur environnementale, aider les installations et promouvoir l’irrigation. Et une demande bonus : l’organisation d’une séance plénière consacrée uniquement à l’agriculture.
Sur ce dernier point, Alain Rousset a validé et l’organisera « en présence des autres organisations syndicales », probablement à la rentrée de septembre.
Pour le reste, ça va être plus compliqué. Le programme Néo terra représente toute l’architecture de la politique d’Alain Rousset, filtrant au tamis de leur conséquence sur le changement climatique chaque action et chaque projet. « C’est un empilement de normes. Vous êtes des actionnaires d’une usine à gaz », a lancé une agricultrice aux élus régionaux, faisant bondir les rangs écolos.
Même accusation concernant le label Haute valeur environnemental ou HVE (« du racket » pour la Coordination), que promeuvent l’État et l’Europe et que la Région applique sans grand entrain, voire qu’elle « n’aide plus depuis deux ou trois ans », explique le vice-président en charge de l’agriculture, Jean-Pierre Raynaud.
1.000 installésConcernant les aides à l’installation, le chiffre de 1.000 agriculteurs aidés en 2023, que répète encore et encore Alain Rousset, ne convainc visiblement pas les agriculteurs. Quant à l’irrigation, c’est plutôt au Rousset président du comité de bassin Adour-Garonne qu’il est fait des reproches, la Région soutenant les installations d’irrigations et même de retenues.
Alain Rousset a démenti point par point ce qu’il a décrit comme étant des fake news de la Coordination. Concernant la prétendue faiblesse du budget régional consacré à l’agriculture, il a rappelé que la région est troisième au niveau national derrière Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie, ces deux régions bénéficiant de dotations européennes plus importantes en raison du positionnement d’une grande partie de leur territoire en zone de montagne.
Reste qu’il reconnaît qu’« on peut bien sûr discuter de la politique de la Région ». Et peut-être de la complexité que représente l’eco-conditionnalité des aides, que plusieurs interlocuteurs ont pointé.
La bataille de chiffres étant un vrai enjeu pour comprendre ce que fait, ou non, la Région, Pascal Coste (LR) a demandé la mise en place d’une mission d’évaluation sur les aides agricoles et hydrauliques, « pour avoir l’ensemble des chiffres avant la plénière dédiée à l’agriculture ». Les autres groupes ont validé l’idée. En espérant que la future plénière ne sera pas le troisième épisode du dialogue de sourds.
Jean-Louis Mercier