Elle veut créer un "petit Moulin rouge" dans une ancienne boite de nuit, en pleine campagne corrézienne
Autrefois, la discothèque la Grange aux loups était l’un des établissements emblématiques des nuits corréziennes. Depuis le 15 novembre dernier, un cabaret s'y est installé dans sa partie haute.
À première vue, on se demande quelle mouche a piqué Marthy Evens pour décider d’installer son cabaret music-hall, New Palace, à la campagne corrézienne ? Mais, en discutant avec elle, on se rend compte que ce pari qui semble osé, est en réalité guidée par une logique économique bien réfléchie.
« Ça fait plus de trente ans que je suis dans le milieu du spectacle, explique cette ancienne danseuse et chorégraphe. Nous avons déjà dirigé un cabaret qui se trouvait en Touraine, en pleine campagne, à Chanceau-sur-Choisille et ça a marché très, très bien. »Le nouveau cabaret a ouvert ses portes le 15 novembre. Photo : Stéphanie Para
Un autre cabaret à BordeauxActuellement, Marty Evens est déjà à la tête d’un autre cabaret, plus connu, « Le Diamant rose », en centre-ville de Bordeaux. L’expérience dans le milieu aidant, elle s’est constitué un solide carnet d’adresses. « J’ai beaucoup de connaissances parmi les agences de voyages, les tour-opérateurs et les autocaristes, affirme-t-elle. À Bordeaux, nous sommes en pleine ville et donc, nous ne pouvions pas faire venir des bus. En Corrèze, l’ancienne Grange aux loups a un très, très grand parking. »
L’affaire a été conclue rapidement. « Il y avait un liquidateur judiciaire sur cette affaire. J’ai pris le rendez-vous avec le maire de La Chapelle-aux-Brocs. On a visité l’endroit et ça s’est fait, parce que je me suis dit qu’il y avait un joli potentiel, avec en plus, la réputation d’un lieu emblématique de la région. »
Une réfection complète de l'intérieurNew Palace, s'est installé dans la partie haute de la Grange aux loups. Photo : Stéphanie ParaMarthy Evens a repris uniquement la partie haute de l’établissement, avec une scène, où se déroulaient des thés dansants. Son parking était envahi d’herbes folles. « Les conditions météo et l’indisponibilité des artisans ne nous ont pas permis de faire des extérieurs, explique-t-elle. On s’est donc concentré sur l’intérieur, pour pouvoir accueillir les gens dans de bonnes conditions. Il a fallu tout refaire et mettre aux normes pour faire passer la commission de sécurité. On a aussi équipé la salle d’une régie son numérique. »
New Palace a ouvert ses portes le 15 novembre. Sa salle rénovée peut accueillir jusqu’à 200 personnes assises ou plus de 300 debout. « On avait envie de recréer un petit Moulin Rouge, de transférer un peu de Paris en Corrèze, avec des plumes, des paillettes et du strass. »
Donner à l'établissement une dimension nationaleQuelle est la fréquence des spectacles donnés ? « Pour l’instant, c’est variable, on n’a pas de visibilité. On travaille avec les tour-opérateurs, agences de voyages, autocaristes, comités d’entreprise, associations et clubs seniors. Il faut se faire connaître et ça prend du temps. On peut aussi bien avoir un ou deux, comme trois ou quatre spectacles par mois. » Le cabaret a embauché deux commerciaux. Avec l’ambition de faire venir les groupes de toute la France, grâce aux agences de voyages et autocaristes. « On est en train de leur envoyer des brochures sur New Palace dans lesquelles sont recensés aussi les lieux à découvrir en Corrèze, comme Collonges-la-Rouge, les Pans de Travassac ou les Tours de Merle. Il s’agit d’inclure le passage au cabaret dans une visite touristique du département d’une journée. »
Quelle est la recette d'un cabaret qui marche ? Marty Evens souhaite donner à son établissement corrézien une dimension nationale. Photo : Stéphanie ParaQuels sont les ingrédients d’un bon cabaret ? « Tout commence par un accueil chaleureux, insiste Marthy Evens. Ici, les gens sont accueillis par les artistes en tenue. Ensuite, il faut un bon repas, goûteux et suffisamment conséquent. Pendant le repas, on propose déjà des animations : du piano-bar, des chansons festives. On fait participer les gens, on les fait danser. Et une fois que le dessert est servi commence le spectacle de 1 h 30. Avec des plumes, des paillettes, du french cancan. Après le spectacle, est proposée une petite animation dansante. Nous avons l’autorisation d’ouverture jusqu’à 2 heures du matin. » À l’ancienne Grange aux loups, la fête est de retour !
Qui est Marthy Evens, danseuse et femme d'affaires aux 700 costumes ?Chez elle, la danse et le spectacle sont inscrits dans le code génétique familial.« Je suis une saltimbanque, une enfant de la balle. Ma maman était directrice de music-hall. Toute petite, je crapahutais déjà avec les danseuses. À l’époque, il y avait sur scène des charmeuses et des charmeurs de serpents, des contorsionnistes, des stripteaseuses, des fakirs… J’ai toujours vécu dans le milieu du cabaret. »
Marty Evens, ancienne danseuse, chorégraphe et meneuse de revue, a plus de trente ans d'expérience dans le métier. Photo : Stéphanie Para
Âgée aujourd’hui de 72 ans, Martine Siroteau, alias Marthy Evens sur scène, a fait ses débuts en tant que mannequin. Mais défiler simplement, ce n’était pas suffisant. Elle se met à chorégraphier les défilés, puis les publicités et les clips musicaux pour la télévision, où elle sera également comédienne.
Elle a joué pour Claude LelouchC’est ainsi qu’elle est découverte par Claude Lelouch qui la fait jouer, en 1981, dans son film Les uns, les autres. Marthy Evens se forme à la danse, aux claquettes, au modern-jazz et à la comédie musicale auprès des meilleurs professeurs. Puis, à son tour, elle crée à Tours, dans les années quatre-vingt-dix, une école de danse, Comédie Musical School, où elle accueille chaque année plus de 500 élèves. À l’époque, sa troupe professionnelle, Les Diam’s, se produit partout en France. En 2000, elle pose sa malle à vêtements avec 700 costumes (des plumes, du latex, mais aussi du tulle ou des jupons roses), à Bordeaux. Elle s’y produit avec une petite troupe jusqu’en 2008, avant de connaître la crise et Pôle emploi.
Une vraie battanteElle se bat pendant trois ans pour monter son propre établissement. En septembre 2011, c’est fait. Femme orchestre, elle est partout, sur et derrière la scène, elle veille à la bonne tenue des repas, à l’accueil et à la présentation des spectacles. Et elle n’est pas près de s’arrêter. Le cabaret, c’est sa vie.
Dragan Perovic