Cinéma, musique, jeu, série, BD : quels sont les nouveaux coups de cœur "culture" de la rédaction ?
Arletty, actrice et chanteuse, en disques ? Ou bien la série Stonehouse sur Arte ? Il y aussi au cinéma Scandaleusement vôtre. Et pourquoi ne pas dévorer la BD La Route, d'après le roman culte de Cormac McCarthy ? Nos journalistes vous aident à choisir parmi les nouveautés "culture" du moment.
Retrouvez la dernière sélection "culture" que vous ont concoctée les journalistes de la rédaction :
DisquesTout Arletty, ça vous dit ? On y trouve évidemment "Atmosphère !? Atmosphère !? Est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?", sa tirade culte dans Hôtel du Nord (1938), qui l’installe dans la légende du cinoche. Mais ces deux disques déroulent bien davantage tant Léonie Bathiat dite Arletty (1898-1992), la môme de Courbevoie, était aussi à l’aise au micro que devant une caméra. Elle avait fait ses classes dans l’opérette et au music-hall, et ça nous vaut un éclatant bouquet de complaintes, de goualantes et de chansons lestes, voire carrément grivoises qu’elle interprétait comme personne, avec son accent inimitable (A La Villette, Coeur de Parisienne, J’enlève ma liquette, Comme de bien entendu, qu’elle chante avec son grand pote Michel Simon...). Cette anthologie épatantes (aux éditions Frémeaux & associés) offre aussi deux lectures, épiques, d’extraits de Mort à crédit (Louis-Ferdinand Céline, 1936), et puis des poèmes de (et lus avec) son autre copain, Jacques Prévert. Que du très bon !Emmanuel Letreulle
Bande dessinéeBeauté de l’apocalypse. Facile à dire aujourd’hui, mais c’est une évidence. La Route, le roman culte de Cormac McCarthy, était fait pour être une BD. Récit atmosphérique. Ambiance écrasante postapocalyptique. La plume du romancier est dense, ne laisse pas d’interstice, de lumière, pas une respiration pour se sortir de cette étouffante histoire de survie d’un père et son fils. Les cases dessinées emprisonnent à merveille nos esprits. Plus que la tentative de film de 2009, le format BD magnifie le torrent de noirceur qu’est ce récit, dans lequel le lecteur se débat sans une chance de survie. Comme les protagonistes. Et qui mieux que Manu Larcenet pour donner vie à l’obscurité ? L’auteur de 54 ans dessine les ombres. Les angles morts. Un tour de maître. Parce que dans La Route, les personnages parlent peu. Leur désespoir n’a pas besoin d’être dit, il est là. Partout autour d’eux. Manu Larcenet ne peint pas seulement un paysage apocalyptique. Il enfante le croisement de l’Enfer et du désespoir. Il fait s’accoupler le vide du monde et le vide des cœurs. C’est vertigineux. Jouissif esthétiquement.(La Route, éditions Dargaud, 160 pages, 28,50 €)Simon Antony
CinémaMéchantes petites lettres. Charmante surprise que ce Scandaleusement vôtre réalisé par Thea Sharrock. Au titre français et son air de déjà-vu, on préfèrera la version originale Wicked little letters, que l’on pourrait traduire par "Méchantes petites lettres". Le scénario de cette comédie de mœurs à l’anglaise, inspirée de faits réels, aurait pu tenir en une ligne : qui a écrit ces lettres anonymes, remplies d’obscénités, que reçoivent les habitants d’un village britannique ? Mais l’intrigue n’est qu’un prétexte pour esquisser trois portraits de femmes dans l’Angleterre des années 20. Celle qui souffre du patriarcat et du poids de la religion, celle qui subit au quotidien les préjugés et la difficulté de s’émanciper, celle qui tente de s’affirmer dans un univers masculin. Toute ressemblance avec le monde d’aujourd’hui n’est (malheureusement) pas fortuite mais rien de plombant. Touchantes quand il le faut, les actrices Olivia Colman, Jessie Buckley et Anjana Vasan n’oublient pas d’exploiter leur potentiel comique.Thierry Senzier
Jeu de société
Un puzzle pour partir à l’aventure. Et si on revisitait l’un des classiques du jeu, le puzzle ? Voilà la riche idée de l’éditeur Game Flow avec "Mon puzzle aventure". Il se joue en deux temps (et 30 minutes) : une première partie sans surprise qui consiste à réaliser ce puzzle de 42 pièces ; et une seconde qui invite à partir en quête d’un dragon aux côtés de l’un des trois héros du jeu, tirés de la collection de livres Ma première aventure. Le but : au fil d’indices inscrits au dos de chaque pièce, vous retournerez les 42 morceaux du puzzle (et les rangerez, au passage, dans leur boîte). Un bon premier jeu d’enquête, en mode "cherche et trouve", pour les 5-10 ans.Arthur Cesbron
SérieStonehouse. S’il existait une classification des espions, il y a fort à parier que John Stonehouse finirait dans la case “pied nickelé”. Figure montante du Parti travailliste dans l’Angleterre des années 60, ce bellâtre qui finira par obtenir un poste de ministre est recruté lors d’un voyage à l’étranger par les services secrets tchécoslovaques après avoir été filmé en fâcheuse posture dans le lit d’une espionne communiste. Contraint et forcé, il se révèle être un piètre espion, au grand désespoir de ceux qui l’ont enrôlé. Diffusée sur Arte, cette mini-série en trois épisodes s’inspire du parcours tourmenté de John Stonehouse promu ministre de l’Aviation en 1967 dans le gouvernement d’Harold Wilson et dont les activités d’espionnage ne seront révélées que bien après sa mort en 1988. Incarné de façon magistrale par Matthew Macfadyen (vu dans la série “Succession”), Stonehouse oscille entre le ridicule et l’empathie sur fond de guerre froide. Un cocktail savoureux saupoudré d’humour britannique qui démontre combien l’hubris peut être néfaste.Martial Delecluse