Avocate agressée au sabre à Thiers : le procès renvoyé, les robes noires solidaires
Le 22 janvier dernier, une avocate avait été attaquée, avec un sabre, alors qu'elle sortait de son cabinet. L’affaire a ému la profession. Et son traitement a suscité un vif débat, ce mercredi, devant le tribunal, avant un renvoi du procès.
Elle s’approche de la barre à petits pas, tend le cou pour entendre ce que dit la présidente puis s’assied sur une chaise qu’on lui apporte. Difficile d’imaginer cette retraitée de 85 ans brandir un sabre japonais puis l’abattre sur une avocate qui sort de son cabinet.
C’est pourtant ce qui se serait produit, le 22 janvier dernier, à Thiers. Cette scène de violence, aussi rare qu’effroyable, avait valu 14 jours d’ITT au conseil et ému toute la profession. Ce mercredi après-midi, une soixantaine de robes noires étaient rassemblées dans la salle d’audience où devait être jugée l’octogénaire, pour soutenir leur consœur, à l'appel de l'Ordre des avocats.
Mais le procès n’a pas eu lieu. Le tribunal a ordonné un supplément d’information visant à réentendre la prévenue, exploiter son appareil photo, son téléphone et recueillir le témoignage de deux passants. Ces nouvelles investigations seront confiées à un juge d’instruction. L’affaire ainsi réexaminée reviendra devant le tribunal le 18 septembre prochain.
Les avocats demandent un requalificationTelle est la réponse apportée aux requêtes de Mes Laure Vaillant et Maud Vian, représentant respectivement la victime et l’Ordre des avocats. Les deux ont demandé la requalification criminelle des faits et leur traitement par un magistrat instructeur."Nous sommes surpris par le choix initial de la procédure, ce sont des faits excessivement graves", s’est étonné Me Vian. "On a essayé d’attenter à la vie de ma cliente, il aurait été de bon de renvoyer l’affaire devant un juge d’instruction", a appuyé Me Vaillant.Dominique Puechmaille, procureure de la République, agacée, a dû défendre le choix du parquet.
"Nous n’avons pas traité ce dossier à la légère. La qualification correctionnelle la plus élevée a été retenue."
Des "violences aggravées par trois circonstances" pour lesquelles la prévenue, qui a fait l'objet d'un expertise psychiatrique, encourt dix ans de prison. L’âge avancé de celle-ci, précise la procureure, a aussi été pris en compte. Les éléments de l’enquête sont-ils insuffisants, à ce stade, pour se forger une conviction, comme le soutient également la partie civile ? L’avocate de la victime n’en est pas persuadée.
Maintien sous contrôle judiciaireLe tribunal a donc coupé la poire en deux. Mais une autre décision avait choqué les robes noires, en janvier : le placement de l’octogénaire sous contrôle judiciaire et non pas en détention provisoire. Celui-ci a été maintenu, d’ici le 18 septembre, avec l’interdiction, cette fois, de se rendre à Thiers.
Olivier Choruszko